Inversions ou retournements ?  - 2

BBB


Les exemples de N inversés ne manquent pas sur de nombreuses représentations artistiques (voir notre première partie), textes imprimés ou pierre tombales et ont souvent été signalés. Sur les lettres INRI du titulus, ce N inversé pourrait laisser penser que pour lui redonner ordre, il faudrait inverser la totalité du panneau. Si nous faisions cela nous obtiendrions alors les lettres IRNI qui perdent sans leur clef de déchiffrage toute signification. R et N seraient alors à leur tour inversés comme sur le site (templier quand même) de St Jean d'Alcas (voir ici sur l'excellent site "le coin de l'énigme")
Pour beaucoup d'esprits cartésiens voilà qui ne prouverait de toute façon pas grand chose.




Pourtant, j'ai eu la surprise de découvrir dans une très belle petite église du Tarn un crucifix présentant cette inversion totale des lettres du titulus.
Erreur du sculpteur ?
L' explication, pour improbable qu'elle soit, aurait pu être prise en considération si un autre graveur malhabile n'avait commis la même bourde sacrilège dans la petite église d'Espéraza au temps du curé et confesseur de Bérenger Saunière : Jean Rivière.
Erreurs et répétitions à loisirs, dyslexies récurrentes ??




Le site d'André Douzet a tenté à sa manière sous la plume de Juliette Goudin de trouver une raison à cette inversion, voir ici : http://www.societe-perillos.com/esperaza_1.html





Mais, il est probable que nous ayons à chercher encore longtemps la signification de ces jeux de lettres. Pourtant, dans cette même petite église du Tarn, une statue de St Joseph, semble-t-il, est très évocatrice. Le métier hypothétique de charpentier permet de justifier un symbole fort qui n'échappera pas aux connaisseurs.







Si une corrélation pouvait exister alors entre IRNI et INRI, il faudrait probablement y voir un rappel de formules utilisées au cours de rituels ou d'invocations précises reprenant peut-être les lettres hébraïques : Yod, Resh, Nun, Yod. 
Les deux "I", symboles de début et de fin, première lettre du nom de Dieu.
Le R, Resh, symbole lui de la tête en hébreu et correctement placé ici à la tête du Christ agonisant et sur la colline du crâne.
Le N, enfin, sujet de bien des débats et agent provocateur du pivotement, du retournement, de la descente de l'homme-Adam du Paradis vers la terre, de la remontée de l'homme-Jésus de la terre vers le Paradis. Mouvement symbolisé par les deux "I" de début et de fin de formule.
L'assimilation du Christ rédempteur au premier homme est par ailleurs rappelée par le symbole du crâne d'Adam au pied de la croix, comme sur cette crucifixion d'une église de Haute-Garonne qui n'est pas sans rappeler par son esprit celle de Pieusse. (voir ici)









Parfois aussi figure la pomme rendant encore plus explicite la présence du crâne sur le mont du Golgotha. Car Golgotha signifie crâne en araméen, et selon l'antique légende, en ce lieu aurait été enseveli le corps d'Adam. Lieu symbole par excellence de ce double mouvement de descente et de remontée. Mais cette remontée, tout comme le préconise l'adage alchimique, ne se fera pas sans avoir visité l'intérieur de la terre. Alors quel peut être l'agent de ce retournement ou plutôt de ce retour à la source divine, de cette résurrection-rédemption de la matière ? 
Une clef peut nous être justement donnée par le lettre N, le Nun hébreu. 
"Le caractère Protosinaïtique correspondant représente un serpent. Noun signifie serpent en Araméen et c'est également la première lettre du mot serpent en hébreu נחש Nahash" nous disent nos dictionnaires !
Ainsi donc le serpent serait l'élément permettant le retour - retournement. Est-il sur le titulus symbolisé par sa lettre inversée ?







La formule INRI-IRNI serait-elle alors la cristallisation en 4 lettres d'une invocation aux puissances divines permettant retour et résurrection au Dieu créateur et grand architecte de l'Univers ?
Ou n'est-elle que la réminiscence incomprise d'un processus alchimique oublié ? 

Il est troublant de se souvenir qu'aux pieds du Christ en croix, Marie-madeleine figure à jamais. Elle est, bizarrement, elle-aussi porteuse de bien des N inversés sur de multiples représentations. Ne quittant guère un vase bien énigmatique, serait-elle aussi porteuse, en même temps que de ce précieux récipient, d'une symbolique discrète autant qu'alchimique ? 


Christian Attard




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