Le Carracci non inversé





"Piéta"  anonyme dans Notre Dame du Cros (aude)
(Photo François Pous)




Un autre tableau très émouvant décore l'église de Notre Dame du Cros (voir notre première étude ici). Ne pouvant nous appuyer sur une quelconque notice ou commentaire comme pour la copie de la Descente de Croix de Rubens ou le Mariage de la Vierge de Poussin, nous allons devoir chercher seuls qui a inspiré notre peintre.

Le style tout particulier de ce tableau, les deux petits anges sur le côté, nous conduisent au peintre italien Annibale Carracci (1560-1609). 
Annibale était issu d'une lignée d'artistes de grande réputation, avec Augustino, son frère et Ludovico, son cousin, ils fondèrent une académie de savants et artistes : "l'Accademia degli incamminati" et décorèrent le célèbre palais Farnèse.





Pietà, Naples, Musée de Capodimonte 1599




Fidèlement reproduit et cette, fois non inversé, le peintre de Notre Dame du Cros a veillé à rajouter le détail trop peu présent, à son goût chez le maître, du coup de lance. Maniaquerie bien incompréhensible chez ce copiste, puisque les lois de notre physiologie voulant qu'un individu mort ne saigne plus ! Or ici les écoulements sanguins sont représentés même sur le drap mortuaire.







Un autre tableau du même Carracci mous montre à l'évidence que le peintre bolonais connaissait parfaitement ce genre de "détails" car est clairement visible le coup de lance donné au Christ, du bon côté et ne saignant plus. Les mains bleuies, prises par la mort, ne sont pas non plus représentées à l'identique par notre copiste. Supposons, à sa décharge, une mise en couleur personnelle sur un modèle non colorié.







Cependant, on peut quand même noter que d'autres copistes anonymes furent, sur ce plan là, plus sérieux et respectèrent la vision du peintre créateur.




Une copie anonyme de la Piéta du Carracci




On doit, bien sûr à Annibale Carracci une multitude d'œuvres de grand talent aussi pourquoi n'aurait-il pas représenté notre chère Marie-Madeleine ? 
La voici méditative, fort peu vêtue et la larme à l'œil comme il se doit. 
Encore un paysage Castelrennais ?? ( Je plaisante, bien sûr ! )







Et de Madeleine à Saint Antoine, il ne coûte que quelques pas d'ermites, accompagnés d'authentiques et infernales frayeurs.





"Tentation de Saint Antoine"  d'Annibale Carracci




Bien joli tout cela ! me direz-vous, et à part quelques thèmes récurrents qui, après tout, s'expliquent parfaitement par l'analyse des sources d'inspirations chrétiennes communes à tous ces peintres qu'en déduire de plus ? 
Peut-être précisément que même au sein de nos énigmes reviennent vers nous ces images, ces signes, ces inversions qui inlassablement à travers les siècles offrent à notre réflexion leur irritante insistance.

Christian Attard




Détail du coin supérieur haut et gauche de
 "la Tentation de Saint Antoine"  
d'Annibale Carracci

Détail du coin supérieur haut et droit de
la tentation de Saint Antoine"  
de ?? Frédeau d'après Reynié




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