En
possession d'une "authentique" signature de Mathieu
Frédeau, il reste difficile
d'attribuer ce fameux St Antoine à Ambroise ou à Mathieu. La signature
peut en effet, avoir été "honnêtement" falsifiée pour
renvoyer d'Ambroise à Mathieu. N'oublions pas que la tradition
historique du sanctuaire attribue la toile à Ambroise. Difficile en
l'occurrence aussi de se contenter de l'adage "si ce n'est toi c'est donc ton
frère !"
La raison devrait pourtant nous inciter à penser qu'il demeure plus
plausible que le tableau de Notre Dame de Marceille soit bien d'
Ambroise, le toulousain, et non de Mathieu, peintre réputé plus
"itinérant" et jamais à ce jour répertorié dans un
quelconque endroit (musée ou église) du Sud-Ouest.
Nous avons la chance en région toulousaine de pouvoir aller
admirer des oeuvres d'Ambroise Frédeau, frère Lai
des Augustins, exposées à l'endroit même où il vécut et peignit.
Mais il est plus aisé encore de s'essayer à quelques comparaisons avec une de
ses toiles, plus accessible, dans une église du Tarn un St Roch que vous
pouvez admirer ci-dessus.
En préliminaire, notons qu'Ambroise seul, semble être un peintre de
grands sujets. Le musée des Augustins de Toulouse (1) possède :
Jésus-Christ
ressuscité apparaissant à sa mère : h 2,81x l 2.86
St Augustin reçoit l'habit monastique des mains de St Ambroise et de St
Simplicien : h 2,24 x l 1,67
St Augustin présente son cœur à la vierge : h 1,72 x l 2,54
St Nicolas de Tolentino bercé par le concert des anges : h 2,60 x l
2,27
Mathieu dont les oeuvres restent peu connues ne semble pas être allé
aussi loin en dimensions. Quant à la piste d'un Téniers, il suffit
d'analyser la manière de peindre de Téniers pour l'oublier
définitivement ici
Je voudrais vous conduire maintenant avec moi à un petit jeu des comparaisons
entre notre Saint Antoine de Notre-Dame de Marceille et ce St Roch.
Remarquons tout d'abord le rejet du bâton de marche, de la cape et du
manteau dans le même coin inférieur droit sur les deux tableaux.
Examinons ensuite les deux visages, si parfaitement rendus :
deux traits obliques blancs formant l'éclat de la pupille se retrouvent
de part et d'autre. Les peintres de ces deux tableaux ont donc cette même façon de rendre
la lumière de ces regards, mais nous ne pouvons nous arrêter à cela.
Pas plus qu'à ces bouches entrouvertes. |
Nous
avons donc une série d'indices qui pourrait nous laisser penser à un
auteur commun à ces deux toiles sans malgré tout n'avoir rien de
déterminant. Cependant, formés à la même école, deux peintres
peuvent avoir la même façon de représenter certaines choses.
Un peu plus bas pourtant sur nos deux toiles, une autre partie
anatomique semble, elle, être représentée de bien étrange manière !
Le mauvais état de conservation du St Antoine ne nous aide pas dans
notre analyse, mais nous pouvons malgré cela observer la façon dont
sont figurés... les pieds !
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Le retrait du gros orteil
est très caractérisé et en cela peu conforme cette fois aux canons
picturaux.
Enfin, considérons que la signature d'Ambroise Frédeau sur le St Roch se situe en
milieu de toile et que la date du tableau figure, elle-aussi, à un tout
autre endroit près du pied de l'ange.
Il est alors très possible que la véritable signature de ce tableau
n'ait pas été à l'origine sur ce caillou en bas à gauche et que
l'éventuel faussaire n'ait donc pas eu à "maquiller" une
première signature mais à en créer une de toute pièce, hypothèse
que l'on peut aussi envisager, après tout.
Mais tout ce qui précède ne constitue guère que des observations qui
ne veulent en aucune manière avoir force de convictions.
Christian Attard
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