La voie des étoiles

Le portail de Notre-Dame de Marceille - Carte postale J. Le Marigny - La Seyne (Var)


La vierge à l'enfant qui aujourd'hui accueille le visiteur dès le porche d'entrée de Notre-Dame de Marceille semble être ainsi de toute éternité. Et pourtant, elle a subi bien des aléas. 
Une vieille carte postale des années 50-60 nous indique que l'enfant jésus que tient notre benoite vierge Marie se présentait différemment, il avait le bras droit levé et tenait dans sa main gauche un globe surmonté d'une croix. A en croire cette image, l'ensemble décoratif de ce porche était en parfait état. Cependant, à un certain moment, certaines personnes se sont autorisées à bouleverser ce que très certainement d'autres personnes avaient, avec une très grande subtilité, mis en place. 
C'est M. François Pous qui le premier remarqua cette différence d'attitude du petit Jésus laissant libre de toute interprétation cette anomalie démontrée.
Mais avant de recourir à des explications "ésotériques" que le bon sens courant réprouve de nos jours, tentons de comprendre si la représentation initiale de cet enfant Jésus était aberrante au point de désirer une restauration plus respectueuse des règles religieuses de représentation.

Cette vierge à l'enfant ci-dessus, présente dans une église du Tarn, nous démontre qu'il n'est en rien anormal de représenter l'enfant Jésus tenant en main le globe surmonté d'une croix symbole de sa puissance temporelle. Sa main droite certes est baissée. En réalité, il suffit de visiter nos églises pour constater que bien des attitudes de cet enfant se présentent à notre observation : tenant un oiseau, ou Marie lui tendant un oiseau, porteur du globe ou pas. 
Mais, cet enfant Jésus, la main droite levée en signe de bienvenue comme à Notre-Dame de Marceille, est très rare.

De deux doigts, il bénit, ouvre ses bras en signe de compassion mais très rarement salue à la romaine !

A l'exception peut-être, d'un autre site que beaucoup relient à Notre-Dame de Marceille : Notre-Dame du Cros où la dernière station de l'étonnant rosaire extérieur nous donne à voir une représentation quasi similaire ! 

Le porche de Notre Dame de Marceille. (CPA)

Nous verrons d'ailleurs que les deux sites nous renvoient souvent ce genre de petits signes de la main complices et jouent aussi sur la même symbolique.

Mais, revenons à ce porche qui nous intrigue tant !

Certains ont prétendu pour justifier l'intervention d'une restauration totale du buste de cet enfant Jésus que la statue fut autrefois malmenée, qu'aujourd'hui le bras "recollé" à l'envers indiquerait une crypte. 
Mais l'aberration ne se situe pas aujourd'hui ! 
Car aujourd'hui cette statue à retrouvé une très sage "conformité". L'aberration se remarquait "autrefois", lorsque ce salut trivial avait de quoi étonner.

Photo François Pous

Un examen plus attentif en comparaison "avant-après" nous montre bien l'ampleur de la "restauration". La totalité du buste a du être refaite. Mais pour pouvoir justifier du nouveau placement plus traditionnel du bras droit, il a bien fallu réorganiser l'épaule aussi. Ceci rend particulièrement ridicule l'idée du "recollage à l'envers du bras" car on constate parfaitement le placement plus élevé du coude droit et la refonte totale du foulard de la vierge qui a permis d'ancrer la main à son nouvel emplacement dans une posture plus traditionnelle.

Une autre hypothèse serait que, détériorée par quelques mécréants révolutionnaires (les notices rapportent la décapitation des statues en 1793 et on voit en effet les traces de ce saccage), la statue fut autrefois maladroitement réparée et que le bras gauche à aujourd'hui retrouvé son emplacement d'origine. Rien ne serait plus faux ! 
Car il suffit de bien observer le collier de la vierge Marie pour constater que les pierres décoratives ne furent jamais présentes là où figurait le bras. C'est donc justement qu'à l'origine cette statue fut ainsi constituée. Le bras positionné en signe de salut trouvait son emplacement sur le cou de la Vierge est en conséquence le sculpteur ne prit pas la peine de boucler le collier de la totalité de son cercle de pierre.

Avec la modification de ces bras et gestes de l'enfant Jésus, fut aussi effacé le fameux phylactère dont nous avons vu par ailleurs qu'il reprenait une citation d'un auteur à qui est attribué le récit de la quête du Graal. Graal sur le sens profond duquel nous avons aussi tenté de réfléchir.
On peut alors essayer d'en déduire que statue et phylactère formaient, en leur temps, un ensemble ouvert à la compréhension des seules personnes capables d'en méditer le sens profond.

Le geste de la main de l'enfant Jésus élevé en signe d'accueil portait ainsi à l'attention de cette phrase latine qui figurait au-dessus de lui :
"Hanc voce non timida quilibet salutet, non est enim tumida, ut non resalutet.
Phrase latine qui, une fois comprise, dans non pas dans son sens littéral, mais dans sa musicalité subtile, renvoyait elle-même à l'autre main de l'enfant Jésus et ouvrait alors comme le promettait le bon curé de Rennes-les-Bains le regard du pénitent sur la voie des étoiles dont était si magnifiquement pavé ce porche ! Promesse alchimique et assurance de la voie juste que confortait dès l'entrée la symbolique de l'antimoine, représenté par le globe surmonté de sa croix.
Ainsi, nous pouvons peut-être commencer à comprendre pourquoi furent effacés un ensemble de signes : phylactère et position des bras du Christ qui étaient en parfait état et ne nécessitaient aucune restauration, mais aussi tacher de remonter dans le temps à la mise en place de cet ensemble...

Christian Attard

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