Marius Fatin et le Prieuré de Sion




  Château de
                Rennes-le-Château

Le château de Rennes-le-Château.
(Photo Christian Attard)




- Et le Prieuré de Sion ? Comment toute cette histoire a-t-elle commencé ?
- Le prieuré de Sion ? C'est une blague montée de toutes pièces par un monsieur qui avait beaucoup d'humour et dont on ne parle jamais sur les pseudo-sites qui bavassent à longueur de pages sur les mystères de Rennes-le-Château. Le prieuré de Sion est l'invention de Marius Fatin !

C'est ainsi que débuta une de ces homériques conversations téléphoniques que j'eus autrefois avec une vieille dame qui m'assurait avoir très bien connu Marie Dénarnaud pour avoir longtemps vécu dans le domaine de l'abbé Saunière, bien après sa mort.





Eglise et Château

L'église et le Château.



Depuis son premier coup de fil durant lequel cette personne m'avait affirmé qu'elle appréciait ce site pour la "pertinence" de ses articles et félicité pour ne pas être tombé dans le panneau du faux sautoir de l'abbé Saunière. Nous avions ainsi pris l'habitude de quelques échanges informels à propos de Rennes-le-Château. Ce soir là, j'ai voulu aborder avec elle l'histoire du Prieuré de Sion. Conscient, au su du montage qu'elle avait manigancé à propos de l'affaire du faux sautoir, qu'il me fallait rester prudent sur ses dires. N'avait-elle pas mené en bateau, avec un réel sens de la mise en scène, tout le petit monde des chercheurs ou presque autour de ce mystérieux sautoir maçonnique qu'elle avait malicieusement fait passer pour celui de Bérenger Saunière ?

Marius Joseph Henri Fatin naquit le 12 novembre 1894 à Marseille. Incorporé dans le 2e zouave puis le génie en 1914, blessé au front en 17. Mobilisé en 39...Drôle de guerre. De sa vie on ne sait pas grand chose, un passage au Liban et son arrivée à Rennes-le-Château en 1946. Où Il y fit l'acquisition du château et y vécut avec sa famille jusqu'à sa mort.
Quelques articles de journaux locaux que l'on peut retrouver sur l'excellent site de Patrick Mensior, le présentent comme un érudit local. Son fils, Henri, sculpteur et paléontologue amateur, aurait découvert un homme fossile ! Dans tous les cas, le journaliste qui leur rend visite à ce propos en 1966 constate que père et fils vivent en solitaires dans un dénuement quasi monacal. Marius, homme discret, est pourtant décrit par mon interlocutrice du soir comme un joyeux drille, un plaisantin. C'est quatre mois après cet article et un mois après ceux concernant les sculptures d'Henri que Marius Fatin aurait reçu une lettre qui se révèlera être un faux assez grossier.



Lettre à Marius Fatin

La lettre à Marius Fatin, présentée dans les "Dossiers secrets" d'Henri Lobineau


La missive mal maquillée par un plantard, toujours maladroit dans ses montages successifs, semble attester que les deux hommes se connaissaient.

- Bien sûr qu'il se connaissaient ! M'affirme ma correspondante. Puisque c'est Fatin qui a inventé le Prieuré de Sion pour se moquer de la naïveté de ce Plantard !
- Mais comment cela ?
- Lorsque Plantard est arrivé à Rennes et qu'il a commencé à farfouiller de partout, il a rencontré très vite Marius Fatin. Ce dernier a voulu jouer une bonne farce à cet homme lunaire qui lui paraissait être le "Schpountz" idéal.
- Comment est arrivé Plantard à Rennes ? C'était donc avant la création de son prieuré de Sion en juin 1956 ?
- Mais oui ! Plantard était fou. Il a dû faire un séjour à l'asile de Limoux et monter à Rennes en promenade avec d'autres aliénés. C'est comme cela qu'il a connu les lieux et l'histoire du curé, racontée par Noël Corbu à qui voulait l'entendre !

Arrêtons-nous un instant sur ces allégations, peu crédibles, me semble-t-il. Si Pierre Plantard a bien été condamné à six mois de prison, c'était en 1953 pour abus de confiance. En référence aux articles 406 et 408 du code pénal. Soit un détournement de biens par l'intermédiaire d'un abus de confiance sur mineur ou mineure. L'écrivain Jean-Luc Chaumeil a également déclaré qu'une seconde condamnation a suivi pour les mêmes raisons en 1956. Cette dernière, si elle est exacte, pourrait nous rapprocher dans le temps des affirmations de mon interlocutrice. Toutes mes recherches ont été bloquées par l’impossibilité d'accéder aux dossiers de l'asile de Limoux. Ceux qui s'intéressent aux conditions de vie de cet asile dans les années 50 trouveront de l'intérêt à l'ouvrage rare du limouxin Michel Martinez : "20 ans de travail dans un asile de fous".




Livre Martinez

Le livre édifiant de Michel Martinez.
(Coll. Christian Attard)



Mais laissons notre octogénaire continuer :

"Fatin s'est inspiré d'une affiche éditée par les Images d’Épinal que possédait l'abée Saunière. Il s'agissait de la vie édifiante des frères Ratisbonne, les créateurs de la congrégation de Notre Dame de Sion. Il a brodé une histoire de société secrète à laquelle était mystérieusement affilié Bérenger Saunière et inventé ce jour-là le Prieuré de Sion !"




Les frères Ratisbonne

Alphonse et Théodore Ratisbonne, juifs convertis au Catholicisme au XIXe siècle.



Formidable histoire ! Presque trop belle pour que l'on y croit ! Mais, au fond, à l'image de toutes les spéculations qui ont galopé et courent encore sur la colline enchantée.






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