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Brenac,
demeure philosophale ? - 3 -
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Continuons,
si vous le voulez bien, notre visite de l'Église de Brenac.
Nous avons
vu, dans nos pages précédentes, à quel point les symboles peints très
haut sur la voûte sortent des représentations ordinaires décorant
traditionnellement nos
lieux de culte.
Le prêtre qui les a conçues et exécutées était-il, et
c'est le moins que l'on puisse dire, porté à l'originalité ou
désirait-il nous léguer une connaissance "ésotérique" ?
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Sur
cette seconde travée dont nous avons déjà décrit deux fresques, nous
découvrons maintenant notre première croix, la couronne d'épines entoure sa base
alors que notre triangle doré projette cette fois ses rayons à
l'intérieur d'une autre couronne de fleur ou de diadèmes.
Si la couronne d'épines et la croix symbolisent encore une fois le martyre
du Christ, la seconde couronne veut-elle signifier sa gloire ?
Sur le plan
alchimique, l'interprétation n'est guère plus aisée. Bien qu'il soit
assez souvent fait allusion au lys naissant des épines. Ainsi de la mort
symbolisée par la première étape du voyage alchimique naîtra la
fameuse Pierre, la couronne de toute l'Oeuvre. L'épine est un symbole
fort et il est notable de retrouver autour de possessions
des templiers des lieux nommés l'Epine. L'Oeuvre naissant
au cœur des épines telle la rose, jaillira-t-elle en une couronne
d'aubépine blanche ?
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Nous
retrouvons là, la nef, le vaisseau, la barque de Pierre le pêcheur
symbolisant l'église et par extension la barque papale. Pierre à qui,
selon certains, aurait été confiée la conduite de l'église future. Le
premier des grands nautoniers romains.
Il n'est bien sûr pas question du
moindre rapprochement avec le blason de monseigneur Billard qui n'accéda
à l'évêché de Carcassonne que bien après la réalisation de cette
peinture en 1881. Pierre qui ne se prénommait pas Pierre mais Simon et qui
fut l'occasion d'un célèbre jeu de mots : "Tu es Pierre (Képhas)
et sur cette Pierre je bâtirai mon église".
Clin d'œil que Simon rendra à son maître en s'exclamant devant le Sanhédrin : "« Jésus est la
Pierre rejetée par vous qui bâtissez, et qui est devenue la principale
de l'angle » (Actes 4.11)."
L'allégorie du
vaisseau de Pierre ou de la Pierre fut de très nombreuses fois utilisée
par les anciens Philosophes. Mais, ils surent aussi se servir de celle de
la quête de la mythique toison d'or et firent de Jason et de son vaisseau
l'argo, l'image de
l'alchimiste et de son vase (l'argot tinte à nos oreilles comme
l'Argot ou art gothique). Ils enrôlèrent aussi Ulysse, le valeureux
guerrier de l'éternelle Odyssée d'Homère et avant lui encore Noé, le
premier des nautoniers de l'humanité. Son épopée reprise de textes sumériens
retranscrivant avec finesse les différentes phases du grand Oeuvre.
Ici, le mat surmonté d'une
croix nous indique que cette quête se fera sous la protection de la très
Saint Trinité.
L'illustration ci-contre extraite d'un traité de l'alchimiste anglais
Michael Maier, le Viatorium en 1618, nous montre cette même allégorie
du vaisseau naviguant sur l'onde philosophale accompagné des mêmes
volatiles et non loin d'une île. Nous avons déjà rencontré, un peu plus
loin dans l'église, cette même idée lorsque nous analysions cette ancre
surmontée de l'étoile. Nous verrons au bas de cette page combien le concepteur
de ce décor semblait accorder d'importance à cette notion
"marine".
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Nous
voici arrivés dans l'avant-dernière travée avant le chœur même de cette belle
église de Brenac.
Sa voûte ici n'est décorée que de deux croix. Sur la première nous
retrouvons une sentence emblématique des énigmes du Razès et reprise
aussi bien par Bérenger Saunière à Rennes-le-Château que d'Henri
Boudet à Rennes-les-Bains : "In hoc signo vinces". Sentence
qui rassura Christian Rosencreutz, le
Rose-croix, au
tout début de sa quête alchimique.
Sur cette croix victorieuse sont accolés trois cœurs, le premier à
l'intersection des branches est celui de Jésus que nous savons
représenté entouré de sa couronne d'épines, puis au-dessous, celui de
Marie transpercé du glaive.
Mais, contre toute représentation et aussi toute logique, un deuxième cœur est
lui aussi transpercé du même glaive, pourquoi ?
Y aurait-il selon François Courtade une autre Marie ? Veut-il évoquer
celle qui par tradition se tient précisément au pied de la croix ?
Marie-Madeleine ne figure pourtant pas dans son église.
Voilà qui théologiquement est inexplicable !
Enfin, cette croix s'élève sur une volute de nuées.
La croix trouve son
étymologie dans le latin crux. Mais il est intéressant de vérifier
celle du mot creuset, il vient du latin crucibulum dérivé lui
aussi de crux. Cette double étymologie "croisée" n'a pas
échappée bien sûr aux adeptes qui pratiquaient couramment non le grec
mais le latin. Cette direction expliquerait peut-être ces nuées sous la
croix. Quant à nos trois cœurs, veulent-ils alors signifier trois
matières ?
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La
seconde croix de cette travée parait d'abord beaucoup plus simple, il
n'en est strictement rien et loin de là !
Si nous reconnaissons sans
peine les instruments de la douloureuse passion du Christ : fouet, pince,
clous, marteau, lance, éponge, échelle. Il doit être bien difficile à
un prêtre de justifier l'étrange inscription que porte cette croix en
lieu et place du traditionnel INRI. Ici, le peintre a bien inscrit NRJ
(l'agrandissement ci-dessous ne laisse aucun doute), Pourquoi ?
Il nous faut
convenir que rien ne peut justifier cet écart. Mais, ce NRJ, entendu
phonétiquement n'est-il pas Énergie ? Et ce soleil rayonnant là où sur
la croix précédente se tenait le cœur du Christ n'est-il pas lui aussi
énergie ?
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Le plafond de la dernière
travée porte cette peinture de deux cœurs que nous venons de croiser et
sur lesquels nous ne pourrions nous étendre d'avantage.
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Nous
voilà arrivés au cœur même de cette église sur le lieux du sublime
sacrifice sanctifié par la très sainte eucharistie, il est donc tout à
fait normal que ce soit le très noble calice qui y soit exposé
entouré d'un cercle que l'on peut penser figurer l'hostie. En son centre
triomphe notre triangle de la Trinité Divine.
Mais pourquoi donc
ce triangle n'est-il plus désormais de plein or mais, pour plus de la
moitié peint, en rouge ? Sommes-nous aussi au bout de notre pèlerinage
arrivés à toucher le but ultime la très fameuse et véridique Pierre
Philosophale, le Graal des Adeptes ?
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A
côté du Saint Calice, figure l'Arche d'Alliance qui trône également
au-dessus du chœur de Notre Dame de Marceille. Elle est ici représentée avec
ses deux barres de transport. En toute fidélité aux textes, entre les
deux chérubins se matérialise l'éclat Divin sous forme d'une lumière
qui irradie notre scène.
Car l'Arche était avant tout l'endroit où entre les chérubins se
manifestait Dieu.
Comme dans l'ancien temple de Salomon, nous avons atteint le Saint des
Saints, le lieux où reposait l'Arche. Cette représentation, contrairement
à ce que l'on pourrait croire, n'est pas rare dans nos églises. Mais on ne
voit jamais s'y manifester la lumière de Dieu.
Nous retrouvons ici
aussi, mais semble-t-il vu par dessus, ce que nous ne pouvons peut-être
plus considérer comme triangle mais comme cône ou pyramide de lumière.
Avons-nous atteint l'Arcane des Arcanes, l'ultime but de la Queste ? l'initié
peut-il enfin voir Dieu au sein même de sa
création sur l'Arche entre ses deux chérubins ?
Les ailes se touchent formant Arc entre elles-ailes apparaît la pierre
conique symbole du Divin ici bas.
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Quelques
pas encore, et nous verrons alors tout là-haut, au plus haut de son
église, l'ultime message de François Courtade. En un soleil éclatant de
lumière, il a voulu représenter ce triangle, ce Delta lumineux diraient
nos "très chers frères" francs-maçons.
Quoi de plus habituel.
Il n'est pas rare en effet de retrouver ce symbole dans nos églises. Il
contient en son centre le tétragramme du nom de Dieu : YHWH (יהוה)
composé des quatre consonnes yō (י),
hē (ה), wāw
(ו) hē (ה).
Nom imprononçable dans le culte judaïque mais que nous, occidentaux, avons
traduit le plus habituellement par Yahweh ou encore Jéhovah.
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Le
triangle rayonnant dans une église du Tarn.
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Seulement, il doit être très
très rare de trouver ce nom inscrit dans un triangle de couleur rouge, je
n'en ai pour ma part pas encore trouvé et il doit être encore bien plus
rare de ne pas y voir figurer le fameux tétragramme.
Car à Brenac, et contre toute attente, nous ne pouvons pas lire au sein de
ce triangle irradiant les quatre lettres qui forme le nom de Dieu !
Alors, on se prend à se rappeler que le triangle pointe en haut et symbole
de feu, de ce feu principe cher aux hermétistes.
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Des
amis israélites consultés m'ont, pour certains, déclaré lire ici en
hébreu : "Haim" qui veut dire la Vie, ou même les vies puisque c’est un mot
pluriel.
Le "Haïm", c’est l’exclamation heureuse qui accompagne les bonheurs de
la vie. Ici, dans notre évocation,
c’est le cri de l’espoir qui triomphe finalement des ténèbres.
D'autres ont pensé y voir les quatre premières lettres de l'alphabet
hébreu.
Il semblerait que des parties de ces lettres soient effacées, un
restaurateur n'aurait-il pas su retracer les caractères exactes ?
Peut-être quelque lecteur y verra une autre signification...
Quoiqu'il en soit ce symbole demeurera ainsi bien mystérieux.
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Il
nous faut quitter Brenac bien que l'église recèle encore bon nombre de
mystères. Mais avant de refermer ses portes
ancestrales, c'est une dernière chapelle qui va nous livrer une partie
de son secret.
Une chapelle tout aussi étrange que bon nombre des agencements de
Monsieur le curé Courtade. Là, une terrible mise en scène nous donne
à voir un christ mort, allongé sur une petite estrade le corps
mi-couvert d'un drap d'or. Ce corps divin profané, déchiré est là à
même le sol entouré de tentures rouges.
Au-dessus, sa mère, reine couronnée le porte pour un temps, le
protégeant contre l'homme-loup, l'homme-fou qui le crucifiera plus-tard
croyant lui ôter l'éclat de sa divinité.
A sa droite, un saint ou un élu veille, est-ce Saint-Jean, le plus jeune
des disciples à qui le Christ confiera avant d'expirer le soin de
veiller sur sa mère. Son genou droit découvert laisse penser qu'il
saura désormais agir en sage et en initié.
A la gauche de Marie, Sainte Germaine ou Sainte Roseline peut-être, car
l'une et l'autre transformèrent le pain en roses. André Douzet a
souligné l'importante présence de Saintes aux roses dans l'église de
Brenac...
Ces trois statues frappent par la richesse de leur dorure. La signature
du nom de Courtade au pied de la Vierge nous confirme l'implication de
ce prêtre dans cette riche mise en scène.
Saisis par sa grandeur oserons-nous nous approcher ?
Seul le pèlerin
attentif, celui qui sait combien d'espoir, combien de monde en devenir,
de Christ en gestation porte en elle la Divine mère, s'approchera alors
de trois pas respectueux. Il verra les étoiles qu'il comptera,
peut-être y en aura-t-il cinq, il verra l'ancre blasonnée sur le genou
droit de la Vierge et il aura l'espérance d'arriver en son vaisseau à bon port. |
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Il nous
resterait encore bien à voir et à dire en ce lieu mais dès lors, un
observateur objectif ne peut que constater ici une volonté de mise en
scène, une volonté de dire à travers les temps et par le support des
symboles, bien supérieure à celle qui a pu s'exprimer dans l'église
de Rennes le Château.
Il est raisonnable de prendre en considération cette église et le
concepteur de son décor pour, peut-être, imaginer que certains
prêtres du Razès participaient d'une connaissance secrète et très
certainement d'un groupe d'ésotéristes rassemblés au sein même de
leur milieu clérical.
Christian Attard
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Notes
et sources :
Voir ici et les pages suivantes dues à André Douzet : http://www.societe-perillos.com/brenac_01.html |
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