Par les
entrailles du Christ ! (2)
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La statue
de Saint Vincent
Depaul à Notre Dame de Marceille (Photo
Christian Attard)
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Le
28 février 1608, Vincent Depaul écrit à nouveau à M. de Comet (voir
ici notre première article), mais
de Rome cette fois.
Son nouveau protecteur Pierre-François Montorio, ex-vice-légat du Pape en
Avignon de 1604 à 1607 et alchimiste convaincu n'en finit pas de remercier la
providence d'avoir rejeté près d'Avignon la barque de l'évadé de
Barbarie, de ce drôle de petit basque détenteur de secrets spagiriques.
Il assure donc à Rome la poursuite des études du bon Vincent, tout en
lui promettant une place de choix aux bénéfices fructueux. Mais pour
cela, il faut à M. Depaul la preuve établissant la réalité de ses
études théologiques. Contrairement à ses dires, car il prétendait
n'avoir que le niveau d'une quatrième, Vincent avait été fait bachelier en
théologie à Toulouse. C'est pour
cela essentiellement qu'il écrit à M. de Comet.
Mais au cœur de cette
deuxième lettre, de nouvelles révélations bien surprenantes se font
jour. Lisons Vincent (1) :
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"Mon état
est donc tel, en un mot, que je suis en cette ville de Rome, où je
continue mes études, entretenu par Monseigneur le vice-légat qui
était d'Avignon qui me fait l'honneur de m'aimer et de désirer mon
avancement, pour lui avoir montré force belles choses curieuses que
j'appris pendant mon esclavage de ce vieillard turc à qui je vous ai
écrit que je fus vendu,
du nombre desquelles curiosités est le
commencement, non la totale perfection du miroir d'Archimède ;
un
ressort artificiel pour faire partir une tête de mort, de laquelle ce
misérable se servait pour séduire le peuple, leur disant que son dieu
Mahomet lui faisait entendre ses volontés par cette tête et mille
autres belles choses géométriques, que j'appris de lui, desquelles mon
dit seigneur est si jaloux qu'il ne veut pas même que j'accoste
personne de peur qu'il a que je l'enseigne, désirant avoir lui seul la
réputation de savoir ces choses, lesquelles il se plait à faire voir
quelquefois à sa sainteté et aux cardinaux ../.."
Si comme le prétendent
certains historiens cette aventure aux galères est fausse, on comprend
mal une telle insistance à y revenir avec détails.
D'autre part, Montorio fut bien à la position où le décrit Vincent
Depaul et ce aux dates données également.
Les détails fournis dans cette deuxième lettre sont bien surprenants. Ainsi, il
évoque le célèbre miroir d'Archimède arme redoutable qui enflamma
dit-on les navires romains lors du siège de Syracuse. Si aujourd'hui
une telle arme nous semble dérisoire, considérons qu'au XVII° siècle
posséder cette arme aurait-été un avantage majeur.
Malheureusement Vincent Depaul admet n'en connaître qu'une partie.
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Quand à la tête de mort parlante, on peut imaginer quelque habileté
technique qui permettrait de simuler la parole sur un crane mais
difficilement la provenance de la voix, le disque n'étant pas encore
inventé (à moins que ...) et elle n'est pas sans rappeler cette autre
tête mythique des templiers le fameux Baphomet que certains
décrivaient comme une sorte d'oracle.
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Gageons
que le rusé Vincent s'est bien gardé de détailler l'ensemble des
connaissances appris à la chaleur des fourneaux de son turc archimiste.
Il est fort probable qu'il s'est réservé pour des personnages de plus
haut niveau. Notons aussi que nous ne savons pas quelles études l'ont
tant occupé à Rome.
Doté d'une excellente mémoire, nous avons vu qu'il fut en mesure de
donner à M. de Comet un remède contre la gravelle qui a du faire l'objet
d'une note particulière accompagnant sa première lettre, il ne peut
avoir oublié le complexe processus permettant le sur-production
métallique.
Quoiqu'il en soit personne ne peut nier que depuis cet épisode tunisien
la vie de Vincent va se transformer radicalement. L'ancien petit
berger basque va côtoyer les grands de son temps et multiplier les
créations d'hospices et d'œuvres de charité.
Porteur d'une lettre du très riche pape Paul V (un Borghese) qu'il remet
à Henri IV, il devient l'aumônier de la Reine Margot. Puis sera un
proche confident des plus grands noms du royaume.
Le groupe d'auteurs qui répandra sous le pseudonyme de Fulcanelli bien
des informations stupéfiantes précise que Vincent Depaul ne fut pas le
seul archimiste français du XVIIème siècle. Avec lui, ils
citent (2) : Bernard de Labadye ; Joseph
du Chesne, baron de Morancé, médecin ordinaire du roi Henri IV ; Bardin, du Havre (1638), Mlle de Martinville
(1610) et Blaise de Vigenère (1523-1596) qui fut un proche d'Henri III.
Il est probable, si Fulcanelli dit vrai, que ce secret ne fut que
redécouvert par Vincent Depaul et d'autres, et très possiblement
utilisé et connu des plus grands. Le silence devait alors être
indispensable, ce qui ne signifie pas la non-utilisation du procédé. On
peut douter toutefois que Vincent DePaul se soit personnellement remis à
la tâche d'une production archimique.
Mais d'autres par-devers lui pourquoi pas ?
On sait que le saint homme traversa une période de doutes et de terribles
remises en questions, qu'il décida de donner un autre sens à sa vie que
celui d'un courtisan nanti de bénéfices juteux.
Malgré les tentations, il resta au service des plus démunis.
Avait-il compris que l'argent ainsi produit allait corrompre les âmes et
qu'il ne saurait que se multiplier comme un cancer ronge l'organisme le
plus sain au point de ne pas lui survivre ?
Avait-il compris que seul le fruit de la charité pouvait éteindre la
misère du monde ?
Nous n'aurons sans doute jamais les réponses à toutes ces questions.
Elles demeureront à jamais enfouies au plus profond de souterrains et de
consciences romaines.
Mais, ces réponses n'enlèveraient de toutes manières rien à la
grandeur d'un homme d'exception... qui pourtant, pourtant... pour les
dissimuler au monde profane, lui aussi, un temps perdit tout contrôle de
lui-même au point d'en évoquer...les entrailles du Christ !
Christian Attard
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La statue
de Saint Vincent
Depaul
dans la Cathédrale St Vincent de Tunis
(Photo
Christian Attard) |
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Vers Vincent 3
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Notes
et sources :
(1) - Pierre Coste - Saint Vincent de Paul, Correspondance,
entretiens, documents. I. Correspondance. Tome I (1607-1639), Paris, Gabalda,
1920, p. 5-7
(2) - Les Demeures philosophales et le Symbolisme hermétique dans
ses rapports avec l'art sacré et l'ésotérisme du grand-œuvre.
Société nouvelle des Editions Pauvert, Paris, 2001, Tome 2 p.202-203. |
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