Le chemin de la vérité


En ce mois de mars 1897, la foule des paroissiens de la petite église se presse autour de son bon curé et de ses enfants de chœur. En ce quatrième dimanche de carême vient d'être érigé, station après station et sur ordonnance de l'évêque responsable du diocèse le magnifique chemin de croix que les établissements Giscard de Toulouse ont livré en tout début de mois. 
Toulouse est portant bien loin mais le choix du prêtre s'est porté après avoir consulté plusieurs catalogues photographiques sur le statuaire toulousain. Le prix assez élevé de 500 francs ayant été assumé en totalité par une famille du village, en remerciement fut apposé sur la première station le nom des généreux donateurs. 
Quelques mois, avant un turbulent prêtre du Razès avait fait exactement le même choix que son collègue du Nord-Est de la France en achetant le même chemin de croix de style roman, modèle dit à escalier et en terre cuite au décor riche, mais qui lui coûta près de 100 francs de plus ??

Il ne faut pas être grand clerc pour repérer dans les registres de la maison Giscard le chemin de croix le plus proche par sa date de commande et par son style de celui de Rennes-le-Château (1). Il faut malheureusement un peu plus de temps et de moyens pour arriver à l'approcher. Recherche qui, on le comprend bien, ne se fait pas rivé à son écran et sur Internet. Fort heureusement et à condition de discrétion quant au nom de la commune car les vols et déprédations se multiplient dans nos églises, des amis lointains révoltés par des publications récentes nous ont fait parvenir ces photos. De qualité moyenne, elles permettent malgré tout l'étude du travail du statuaire et nous remercions bien chaleureusement ceux qui se sont appliqués à nous permettre d'accéder à cette connaissance que nous nous empressons de rendre publique ici. Un jour prochain des photos de meilleure qualité remplaceront celles-ci.

Cependant à ce jeu des comparaisons, il faut savoir aussi garder sa raison. Chacun des chemin de croix produit par la maison toulousaine était une pièce unique. Si le chemin de croix le plus proche présente bien des similitudes frappantes notamment en matière de décor de fond, de peintures ou de certains détails, il s'éloigne aussi de celui de Rennes-le-Château sur d'autres éléments et cela est bien normal. Car nous ne sommes pas dans une logique d'industriel ou de fabrication d'usine où toutes les pièces seraient parfaitement identiques et où, immédiatement, une différence demandée par Bérenger Saunière sauterait aux yeux de ceux qui auraient eu à son époque le loisir de courir le pays pour s'hasarder au stupide jeu de ces comparaisons.

En terme de logique en effet, la démarche intellectuelle qui consiste à vouloir comparer deux chemins de croix issus "artisanalement" des ateliers Giscard n'a aucun sens. Comment imaginer un éventuel secret caché sur une œuvre de piété qu'il faudrait comparer à une autre oeuvre, unique comme elle et sise à l'autre bout de la France, pour en percer les arcanes !

Tout au plus cette comparaison permet de mettre un terme à bien des inepties écrites sur ce chemin de croix. Ainsi on voit bien ici qu'il ne saurait plus être question de croix celtique, de points à compter sur l'arc roman ou encore de tour et demi-tour à faire. Même la station une avec ses deux meules ou toits en forme de pain se retrouve peinte quasi à l'identique et à Rennes et ici. La station X aussi présente une grande similitude sur ce fond peint.

Sur une station dix qui a tant fait parler et écrire, Simon porteur de la croix est par contre présent, alors qu'à Rennes-le-Château seule restée oubliée sa main ! Il nous incite à nous poser la question qui de l'acheteur ou du vendeur décidait ainsi de l'apparition ou de la disparition de tel ou tel personnage, tel ou tel élément de décor ?

Les trois dés sont bien marqués là comme à Rennes-le-Château des chiffres trois, quatre et cinq et ne peuvent renvoyer à une quelconque direction. Ils ne sont pas non plus exagérément grossis  et François Pous avait bien raison de nous faire remarquer qu'il avait observé sur d'autres stations X des dés aussi volumineux.

Voilà en tout cas dans leur intégralité ces quatorze stations qui permettent bien des réflexions sur des positions prises avec vigueur depuis quelques années et qui maintenant s'en trouvent singulièrement relativisées.
Reste, à ceux qui prétendent toujours que ce chemin de croix de Rennes-le-Chateau est codé de nous le prouver et cette fois il leur faudrait faire preuve d'un beaucoup plus grand esprit d'ouverture que celui qui consiste à publier cartes postales ou photos variées et diverses sans autres commentaires en rapport avec notre énigme..

Si ce jour de grande révélation vient enfin, ils ne manqueront pas cette fois de trouver des observateurs avisés ayant en main des éléments plus fournis de discussion et d'appréciation. Ce qui est la base constructive de tout travail de réflexion partagée.

Christian Attard, ce 14 novembre 2009

Notes

(1) Nous connaissions cette commune bien évidemment depuis plusieurs mois, bien avant en tout cas une très récente publication "anonyme".
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