Saint
Antoine, priez pour nous !
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La
magnifique statue de saint Antoine dans l'église de Rennes-le-Château
(Photo
François Pous)
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Comme
chaque 17 janvier, la petite église de Rennes-le-Château va connaître
un regain d'affluence à l'occasion de la saint Antoine et de
l'apparition, si le soleil est de la partie, des fameuses boules de
couleur. Mais que se passait-il autrefois ce jour-là au même endroit,
du temps où Bérenger Saunière officiait à Rennes ?
Lorsque
l'on a cotoyé pendant quelques temps l'itinéraire de ce prêtre très
particulier, on ne peut que
regretter que l'un des grands ressort de son existence ait été l'appat
du
gain. Sous toutes leurs formes, Saunière a cédé aux tentations de
l'argent et de la vie de confort qu'il apportait, se plaçant en cela
bien loin des préceptes de pauvreté que prêchait le Christ.
Ce n'est plus un grand secret, et depuis bien longtemps, l'église de
Rennes-le-Château possède une pièce mystérieuse, en effet.
A ma connaissance, le seul qui se soit attaché à la décrire et à tenter
d'en expliquer l'utilité est, une fois encore, l'infatigable André
Douzet (1).
Cependant,
pour aussi claires que soient ses observations, il me semble que ses
suppositions au sujet de l'usage possible de ce réduit soufrent de
certaines contradictions.
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L'absidiole
énigmatique de l'église de Rennes-le-Château, à ses pieds un abreuvoir.
(Photo de
François POUS)
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Accolée au chevet de l'ancienne
chapelle comtale, au mur du cimetière et à la sacristie, il ne fait
aucun doute que la pièce fut rapportée sur l'ensemble architectural. On
n'y pénètre que par un sas, doublement verrouillé, dissimulé dans la
sacristie derrière la porte bien anodine d'un placard de
rangement.
A l'évidence, en effet, le lieu est donc bien réservé aux seuls
prêtres. "solum sacerdotibus" selon la formule "consacrée".
Cependant, Saunière n'étant pas maître de l'élixir de longue vie, il
devait bien se douter qu'un de ces beaux jours l'un de ses successeurs,
lui aussi, découvrirait le placard à système. (2)
La petite pièce en forme de demie rotonde est brute de décoffrage : sol
en terre battue, poutrelles du toit et tuiles apparentes, mais enduit
mural coté extérieur. L'hypothèse retenue par André Douzet qui voudrait
en faire un accès, bien entendu, à un souterrain ne semble pas tenir.
Comment Saunière aurait-il pu évacuer les gravats de ses fouilles ? Et
si, un temps, cette pièce abritait un escalier d'accès, comment
réussit-on à le reboucher ?
Tout transport étant extrêmement difficile par un accès plus que réduit.
Il faudrait alors considérer un
escalier, une entrée éventuelle à peu de distance du sol actuel, or
cela se remarquerait assez aisément. Pourquoi laisser un oeil de boeuff
? Est-ce bien discret à la porte du cimetière ?
En dehors, de M. Douzet, d'autres auteurs ont émis d'autres hypothèses
dont la plus farfelue voudrait en faire une sorte d'isoloir pour
pseudos franc-maçons catholiques en attente d'initiation. Certains y
ont aussi vu une cache possible pour notre prêtre menacé par on ne sait
quels visiteurs agressifs.
Si la thèse d'un isoloir "initiatique" ne peut être retenue dans une
église à l'agencement intérieur on ne peut plus classique, celle de la
retraite sûre ne vaut guère mieux car elle implique que Saunière ait vu
ou su venir ses visiteurs suffisamment tôt pour courir se cacher, ce
qui par ailleurs ne lui ressemble pas. Et encore une fois, cette pièce
est visible de tous.
Seul le
stockage en ce lieu d'objets de valeur peut être envisagé.
L'accès en est mal aisé, peu discret car il implique de passer par l'
église qui, à l'époque de Saunière, était le plus souvent ouverte
librement aux paroissiennes. Huiles, bougies, cierges ont donc très
bien pu être entreposés là, à l'abri des petits larcins et cette
pièce peut se revéler être un efficace coffre-fort. Mais le curé
avait-il besoin de tant d'espaces pour quelques cierges ?
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Bénédiction
de mulets dans le Vallespir
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Bien oubliées aujourd'hui les superstitions et coutumes de
nos campagnes portaient autrefois vers les églises, un grand nombre de
paroissiens qui n'y auraient pas mis les pieds en temps ordinaires.
Et une préoccupation surpassait toutes les autres, l'attention au
bétail, source de revenus et de subsitance. Aussi une fête qui
avait pour finalité la protection de ce bétail ne pouvait être
négligée.
Le 17 janvier, jour le la Saint Antoine partout en France se
rassemblaient donc autour d'un curé, bien négligé autrement, des
éleveurs et paysans soucieux de protéger leur cheptel par les prières,
offrandes et bénédictions.
Un jour béni pour Bérenger Saunière aussi !
De toute
la région devait donc monter vers l'église de Rennes ou de Brenac des paysans
chargés de sacs de grains, blé, avoine, orge que le prêtre allait
bénir. Puis ce grain, mélangé à la pitance des bêtes, était sensé les
protéger des maladies et parasites.
Parfois le grain est remplacé par un sac ou une poignée de sel qui fera
même office. Tous iront ensuite écouter la messe, dire une prière au
bon saint Antoine, laisser un sou au tronc ou allumer un cierge.
Parfois, le prêtre allait même jusqu'à bénir mulets, chevaux et bêtes
de somme menés jusque devant l'église.
Le bon saint Antoine était aussi le protecteur des cochons et sa fête
précédait de peu celle qui aurait lieu à l'abattage des bêtes.
Dans certaines régions se constituaient des sociétés de saint Antoine,
chargées de l'organisation de la fête du 17 janvier. Dans tous les cas,
le curé n'était pas oublié et recevait des offrandes en vin, fromages
et
parfois sous forme d'un jambon !
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Veyrine de l'église saint
Jean-Baptiste de Canejan (Gironde)
(source libre wikipédia)
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Le 17 janvier aussi, on conduisait en région
Aquitaine devant des Veyrines miraculeuses (fenêtres rondes placées au
chevet des églises) des enfants soufrant du "mal bleu" autrement nommé
"mal de saint-Antoine" et qui atteignait leur cuir chevelu. La coutume
voulait que ces enfants, aidés par leur parents ou des personnes
dévolues au passage par la veyrine, se présentent ces jours là tenant
des cierges que l'on fera brûler dans l'église. (3 - 4 - 5)
On aidait alors le malade ou par
précaution, le nouveau né, à passer sa tête par la fenêtre circulaire de
l'église. On relève même des textes qui indiquent que faute de veyrine,
des paysans demandaient à passer dans un placard de la sacristie !!
Jusqu'où vont se cacher les superstitions populaires ?? (6)
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Or
Bérenger Saunière ne manquait jamais de se réapprovisionner en cire de
qualité chaque année à la veille ou après le 17 janvier. Ainsi,
note-t-on dans les relevés effectués dans ses carnets de correspondance
par Octonovo (7) :
- vendredi 15 janvier 1897 -
Réception Chef de gare Couiza Avis arrivage de la cire - 2 colis
- samedi 22 janvier 1898 -
Réception CARRIERE frères (Bourg la Reine) Envoi de la cire (8)
- dimanche 22 janvier 1899 - Réception Chef de
gare Couiza arrivage de la cire
- jeudi 11 janvier
1900 - Réception
CARRIERE Bourg la Reine - Envoi de la cire
La maison Carrière Frères existe toujours, elle connut un gros succès
avec un produit phare : "la bougie de la Madeleine" ! Bougie que n'a
pas pu ignorer notre cher prêtre.
D'autre part sa réclame mettait en avant un fort étonnant logo qui
rejoint bien tout ce que nous avions dit sur le culte du Sacré-coeur de
Jésus parmi les prêtres de la région. "In Hoc Signo Vinces" surmontant
le nom de Montmartre.
Christian Attard
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(1) voir l'interprétation de M. Douzet : http://www.societe-perillos.com/piece_secrete1.html
(2) Il faut toutefois noter que la sacristie de
Rennes-le-Château est bien loin d'être le seul endroit où de telles
doubles portes existent. Dans un souci de cohérence esthétique,
d'autres sacristies ont ainsi cachées sous l'harmonie du bois des
placards de rangements, des entrées de vestibules ou des montées de
chaire.
(3) "Un
vieux rite médical" de Henri Gaidoz, membre de la société des antiquaires de
France (Ex Académie celtique". Paris 1892
(4) "Dévotions
et traditions populaires dans la Gironde" M.Augier Bordeaux 1882 dans Mémoires de la société
archéologique de Bordeaux T.IX
(5) http://memoiresdesgraves.fr/
(6) "Traité des superstitions" de J.B. Thiers T.III et livre V page 202
(7) pour la
retranscription des carnets de correspondances de B. Saunière voir le
travail de Laurent Octonovo : http://www.octonovo.org
(8) Les établissements Carrière Frères existent toujours à
Bourg-la-Reine : http://www.carrierefreres.com
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