Les trois morts
secrets |
||||
|
||||
|
||||
Si
on évoque souvent l'horrible assassinat de l'abbé Gélis,
si on extrapole sur la mort d'Henri Boudet ou sur celle
de Noël Corbu, on a peu commenté la sinistre découverte
de trois cadavres dans la propriété de Bérenger Saunière
par MM. Descadeillas, Malacan, Brunon et Despeyronnat.
Gérard de Sède ne manque pourtant pas de relater les
faits dans son ouvrage "Le trésor maudit de
Rennes-le-Château" (1).
Il reprend assez fidèlement un article de La Dépêche
du Midi paru le 3 avril 1956. (2) |
||||
|
||||
Maquisards
républicains espagnols |
||||
En voici
l'extrait le plus intéressant :
"Ainsi des chercheurs bénévoles s'affairaient-ils, samedi soir, dans le parc de M. Noël Corbu. propriétaire de l'hôtel La Tour. Des arbres centraux ayant été désignés à leur attention par un radiesthésiste de passage, c'est à leur pied qu'ils pratiquèrent les premières fouilles. Et c'est ainsi qu'à quelque 1 m. 50 de profondeur ils mirent à jour un crâne et des ossements divers. Pensant se trouver en présence de quelque spécimen de squelette moyenâgeux comme on en trouve tant dans notre région au riche passé, les ouvriers déposèrent sans plus d'attention leur macabre découverte sur le remblais de l'excavation. Grande fut leur surprise en voyant les chiens de M. Corbu s'approcher aussitôt des ossements rassemblés pour les lécher. En effet des lambeaux de chair adhéraient encore au crâne ainsi que quelques cheveux. De plus, un restant de moustache se trouvait piqué sous l'os nasal. Détail particulièrement troublant, des morceaux d'un vêtement tricoté étaient disséminés dans la fosse découverte. Un mystère de plus à élucider dans ce haut lieu énigmatique de Rennes-!e-Château." Le Midi Libre, un autre quotidien local décrit lui aussi mais plus succinctement, les circonstances de l'exhumation des cadavres (3). Enfin, le fait divers est repris par Ici Paris, mi-avril. L'hypothèse de maquisards espagnols est avancée ainsi que la datation du drame qui, selon les constatations des experts, remonterait à une douzaine d'années, soit en 1944. |
||||
Des combattants espagnols à l'entraînement dans le parc d'un château de Montréjeau. Photo DR | ||||
Cette macabre découverte pose une foule
de questions dont beaucoup restent sans réponses.
Pourquoi personne au village ne semblait pouvoir apporter le moindre éclaircissement sur la tragédie qui s'est déroulée au cœur même du domaine de l'abbé Saunière ? Comment cette exécution a-t-elle pu avoir lieu sans que Marie Dénarnaud (1868-1953) n'en ait connaissance ? A plus forte raison, comment trois hommes dans la force de l'âge ont pu être enterrés sommairement sans que personne ne s'en aperçoive ? Par déduction, on peut supposer que ces hommes étaient étrangers au village. Ce que confirme le fait qu'un maquis espagnol se serait installé pendant plusieurs mois en 1943 dans la propriété. En effet, si les trois victimes avaient été connues de la région, on peut penser qu'elles auraient été déclarées disparues, recherchées par leur proches. Ce ne semble pas être le cas et la gendarmerie qui enquêta en 1956 n'a rien découvert dans ce sens. On peut donc en déduire qu'effectivement, ce furent trois étrangers rattrapés par un groupe d'hommes, plus important encore, qui furent massacrés ici. |
||||
Le camp des réfugiés
espagnol de Bram (Aude) (Coll. Christian Attard) |
||||
Lorsqu'éclate la
seconde Guerre mondiale, la France compte de nombreux
exilés espagnols ayant fui le régime du général
Franco. Leur situation est très vite dramatique. Le
nouveau régime de Vichy leur est hostile et les nazis
ne vont pas tarder à exiger leur arrestation. Les
espagnols vont alors tout naturellement rejoindre la
Résistance et seront particulièrement actifs dans le
sud de la France. Des groupes entiers n'y sont
composés que de républicains ou d'anarchistes
espagnols. En
1944, on estimait que 60 000 maquisards espagnols
se battaient dans le Sud-Ouest. Formés
au combat de guérillas, ils vont vite se montrer
indispensables par leur connaissance des armes et
explosifs et du terrain, contribuant à faire passer
par les Pyrénées un grand nombre de résistants et de
juifs. Leur intention est aussi d'obtenir une
hypothétique aide si le conflit s'achève pour rétablir
la République en Espagne. La France ne dira jamais assez combien elle doit au sacrifice de ces espagnols. |
||||
Recrutement et
formation au maquis. |
||||
Le 7
novembre 1942 se crée à
Toulouse, l’UNE (Unión Nacional
Española) sous la direction du Parti
Communiste Espagnol. Le groupe a pour objectif de
rassembler et de diriger tous les maquisards espagnols.
Mais, le 9 septembre 1944, se forme l’Alianza
Democratica Española
qui en opposition, désire réunir toutes les tendances
politiques à l'exception des communistes. Les deux
groupements entrent très vite en conflit. Il faut dire
que L’ADE dénonce les méthodes de disparitions et
d'assassinats de maquisards espagnols d’autres tendances
politiques pratiquées par les communistes. Et nous en revenons au massacre de Rennes-le-Château qui ne peut être le fait des forces d'occupations allemandes car la mémoire populaire en aurait gardé trace. Ce qui peut passer comme de simples supputations s'appuie cependant sur une base assez solide : la découverte dans le journal Le populaire des 2 mai et 11 septembre 1938 de deux articles concernant les comités de soutien à l'Espagne républicaine. On y lit le nom de Rennes-le-Château comme étant le siège local dans l'Aude d'un de ces comités, prouvant une implantation locale dès 1938 de fortes sympathies aux républicains. |
||||
Mise à jour du
8 juin 2020 : Un autre article en
complément vient éclairer un peu plus cette sombre
histoire. On y apprend que c'est dès 1936 qu'un groupe
de Républicains espagnol trouve refuge à
Rennes-le-Château. Mais selon le journal "Le Jour"
du 27 septembre 1936, c'est dans le château et non
dans le domaine de l'abbé Saunière. Notons qu'il n'y
est nullement question de trésor...
|
||||
|
||||
Notes et sources : -
Républicains espagnols en Midi-Pyrénées, exil,
histoire et mémoire - Presses universitaires du Mirail. (1) - Gérard de Sède, Le trésor maudit
de Rennes-le-Château", Éditions J'ai lu, 1968. |
||||
Retour vers la Reine |