Ourim et Toummin








Détail du retable de l'autel paroissial de Saint-Bertrand de Comminges.
Partie droite : les sacrifices de l'Ancien testament.
(Photo Christian Attard)





Malgré le travail incessant des nombreux exégètes des textes bibliques qui se sont succédés tout au long des siècles, malgré d'innombrables nouvelles traductions du Livre des livres, il nous faut bien admettre que certains détails des rituels les plus secrets enseignés par le Dieu de Moïse aux Grands prêtres qui l'ont servi nous restent bien obscurs.

Oubliés des historiens, ces rites le sont aussi des chercheurs qui pensent pourtant que nos prêtres du Razès ont pu retrouver la fameuse Arche d'Alliance !
Mais, contrairement à ce que croit le grand public, le contenu de l'Arche représentait aux yeux du peuple d'Israël un aussi grand trésor que l' Arche, elle même. 

C'est à ce contenu que nous allons nous intéresser.





Le grand prêtre dans le temple de Salomon présente le vase d'or contenant la Manne divine.
(Photo Christian Attard)




Nous avons retenu de nos catéchismes et de quelques romans et films, le merveilleux entourant l'Arche d'Alliance. On se souvient qu'elle fut construite sur les indications très précises du Divin pour lui servir de lieu de matérialisation entre deux représentations de taureaux ailés posées sur son couvercle d'or massif et nommées Chérubins
Ce coffre contenait les deux tables de la loi en pierre, et selon les Épîtres aux Hébreux, le bâton d’Aaron et un vase d'or protégeant la Manne divine qui nourrit le peuple de Moïse durant sa traversée du désert.




Le grand prêtre Aaron, qui seul pouvait approcher l'Arche, était lui-même soumis à des règles de comportement et de tenue très strictes. 

L'ensemble étant très précisément décrit dans le livre de l' Exode. Mais nous en avons également un très bon témoignage dans les Antiquités judaïques de Flavius Josèphe
(1).

La partie supérieure de la tenue de ce grand prêtre était d'une intense richesse, composée des pierres les plus précieuses.
Au niveau de sa poitrine, la tunique (Ephod) qu'il portait, laissait place à un carré ouvert sur lequel venait s'accrocher par des anneaux une poche nommée pectoral (l'hoshen). Ce pectoral protégeait douze pierres précieuses, symbolisant les douze tribus d'Israël. (Voir illustration ci-contre).

Au chapitre 28 verset 30, nous pouvons lire  ceci, en général peu commenté : 

"Tu accrocheras au pectoral du jugement les ourim et les toummim et ils seront sur le cœur d'Aaron quand il entrera devant la face de Yhwh, et Aaron portera le jugement des fils d'Israël sur son cœur devant la face de Yhwh pour toujours."
(2) 
ou selon d' autres traductions : "tu placeras dans le pectoral du jugement le Ourim et le Toummim..."
(3) ou "tu adjoindras..."(4)


Source libre Wikipédia :
Breastplate of the Jewish Kohen ha-Gadol (High Priest). From the 1905-1906 Jewish Encyclopedia





Mais que sont ces Ourim et Toummin ?


Il semble, pour certains exégètes que ce soient des objets utilisés pour déterminer la volonté de Dieu, ce que paraissent en effet nous confirmer plusieurs passages de la bible. Ainsi, dans le premier livre de Samuel en 14.v 38 et suivants, où Saül demande au Seigneur si ses troupes doivent poursuivre les Philistins. Selon uniquement la traduction de la Septante : 

Et Saül dit : " Seigneur, Dieu d'Israël, pourquoi n'as tu pas répondu à ton serviteur aujourd'hui . Si la faute est sur moi ou sur Jonathan mon fils, Seigneur Dieu d'Israël donne Ourim; si la faute est sur le peuple Israël, donne Toummim." 
Certaines traductions ne donnent que  les toummin
(3) d'autres n'évoquent que les sorts ayant ainsi traduit les deux mots.

Auparavant dans les nombres 27.21, à propos de la nomination de Josué :

"Il se présentera devant le prêtre Eleazar qui demandera pour lui, devant le Seigneur, la décision du Ourim."

Et dans le Deutéronome en 33,8 :
"Et pour Lévi, il dit : Ton toummim et ton Ourim appartiennent à l'homme qui t'est fidèle..."

Nous retrouverons encore ces deux termes dans Esdras 2-63 et Néhémie 7-65 qui reprend le même passage, toujours avec cette même signification de consultation et de tirage des sorts selon la volonté du Seigneur.

Voilà donc qui fait plus que se préciser : par une sorte de tirage, on obtenait donc la pseudo décision de Dieu. Mais, il nous faut encore consulter les Proverbes en 16-33 pour obtenir la façon de procéder :

"On agite les dés dans le gobelet, mais quelle que soit leur décision, elle vient du Seigneur".
(4) plus littéralement : on jette les sorts dans le pan " (4), sorts représentés par Ourim et Toummin serrés dans le pan de la robe sacerdotale.

Ainsi, une pratique divinatoire consistait à lancer des sortes de dés pour connaître les volontés de Dieu. Ces dés ou pierres seraient alors Ourim et Toummim. Dont l'une indiquerait une réponse positive et l'autre une réponse négative. C'est aussi l'opinion de Paolo Coelho dans son très célèbre "Alchimiste" :

"Une pierre noire, une pierre blanche, ourim la blanche signifie non , toumim la noire signifie oui ".

Pour Rachi, le savant rabbin protégé du comte de Champagne, le Nom ineffable de Dieu, celui qui ne se prononce pas, était inscrit sur un parchemin et glissé dans les replis du pectoral.
Puis, on adressait les questions fondamentales aux Ourim et Toummim, comme la loi mosaïque le précise. Les lettres gravées sur les pierres s’éclairaient, formant les mots de la réponse divine, que l’on pouvait « lire » de cette façon.
(5)





Le pectoral du grand prêtre - basilique Notre-Dame de Fourvière à Lyon.
(Photo Christian Attard)




Enfin, Maurice Magre (1877-1941) nous présente, sans malheureusement nous donner ses sources et avec semble-t-il quelques confusions, une autre vision du processus divinatoire. 

Selon l'ésotériste toulousain l'Urim et le Thumin, symboles du Oui et du Non en Onyx étaient disposés sur une sorte de carré magique nommé Ephod (en réalité une tunique de lin que portait le Grand Prêtre), des figures sculptées nommées Théraphim étaient alors disposées selon un rituel connu du seul Grand prêtre sur l'Ephod. Leur position était interprétée pour révéler le message de Dieu. 
Leur placement entre les Chérubins, lieu de matérialisation de l'esprit divin, pourrait alors correspondre à l'hypothèse émise par certains chercheurs d'un champ d'énergie constitué par l'arche elle-même et qui se serait focalisé précisément entre les Chérubins. A cet endroit, l'énergie condensée par l'arche aurait pu faire se mouvoir quelques pièces lourdes sur le couvercle d'or. 

Maurice Magre voit dans ces Théraphim les ancêtres de notre Tarot et pense que le célèbre astrologue Nostradamus savait manier ces figures pour en apprendre l'avenir. Il fut sans doute le dernier car aujourd'hui tout cela semble bien oublié.

Christian Attard




Notes et sources

1 - http://remacle.org/bloodwolf/historiens/Flajose/juda3.htm#VII
2 - Bible de la Nouvelle traduction - Bayard 2001
3 - Bible TOB
4 - Traduction de Louis Segond
5 - Voilà qui nous fait penser au Graal de Wolfram von Eschenbach où dans son Parzival, il nous indique qu'une mystérieuse inscription d'origine divines donnait le nom des appelés vers la Queste. 




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